Photographie d’internés avec bérets fascistes
Triple rangées de 12 internés; trois accroupis devant et cinq presque cachés au dernier rang. Leurs vêtements suggèrent que le cliché a été pris au printemps ou en automne. Une carte d’identification indiquent le numéro « 36 » est placée au sol à côté de l’interné accroupi à l’extrémité droite. Le groupe se trouve devant un bâtiment dont la façade semble recouverte de planches de bois cloutées, avec deux fenêtres encadrées visibles. On pense que le premier homme debout tout à gauche est Antonio Di Pietro; derrière lui à sa gauche se trouve Osvaldo Giacomelli (en chandail blanc). Cette photo a sans aucun doute été prise au même moment que celle de DICEA2011.0001.0010.
La photographie est datée de 1943 à l’encre noire. De ce fait, elle devrait avoir été prise au Camp d’internement de Fredericton, où les derniers internés italo-canadiens ont été transférés en juillet 1942. La carte d’identification utilisée suggère qu’il s’agit d’une photographie prise par un représentant du gouvernement.
Le dos de la photo est agrémenté de la signature de plusieurs hommes, dont des internés italo-canadiens, un membre de la marine marchande italienne (Testa) et probablement des internés germano-canadiens. Dans sa lettre, Vincenzo Poggi indique que quatre de ces hommes faisaient partie de la faction fasciste du Camp Ripples : Maravalle, Cocomille, Giacomelli, Di Pietro et Testa (voir LDICEA2011.0017.0008).
La plupart des hommes sur la photo porte des bérets ornés de glands, insigne fasciste, et de l’inscription « Me ne frego », en français : « Je m’en fiche ». Des articles plus anciens sur le sujet utilisaient de tels symboles et autres activités pour signifier un soutien au fascisme de la part d’internés italo-canadiens. Dans sa récente analyse parue dans Beyond Barbed Wires: Essays on the Internment of Italo-canadiens, l’anthropologiste Sam Migliore mentionne la nécessité de considérer des significations multiples lorsque l’on analyse des symboles. Ainsi explique-t-il que « les symboles de toute sorte sont des constructions humaines qui n’ont pas de sens en eux-mêmes ». Ainsi, si le port de bérets peut suggérer soutien et sympathie à la cause fasciste, il peut aussi refléter l’appartenance et l’identité du groupe, ou son ressentiment face à l’internement.
Si la photo montre un groupe de personnes dont on peut présumer l’appartenance au mouvement fasciste, du fait des accessoires fascistes portés, il est fort probable que, non seulement le cliché ait été pris par un représentant du gouvernement mais qu’il ait aussi été examiné par les Opérations d’internement. À peine visible à l’encre rouge, on distingue ce qui est probablement l’inscription tamponnée « CANADA INT-OP CENSORED » (censuré par op-int Canada).
La photographie appartient à une collection détenue par l’interné italo-canadien Osvaldo Giacomelli. Avant son décès, il s’était exprimé sur enregistrement à propos de son internement avec des journalistes et universitaires. Il a été suggéré que Giacomelli aurait été un sympathisant du fascisme et de Mussolini. L’un des internés italo-canadiens détenus pendant le plus longtemps, il a été libéré le 29 mai 1945. Giacomelli lui-même pensait qu’il avait été interné à tort et a intenté un procès au Gouvernement du Canada en 2005. Lorsque Giacomelli est décédé en mars 2006, son dossier était encore non-résolu.